FIST OF FURY 2 : LA FUREUR DU TIGREEn 1973, la mort brutale de Bruce Lee laisse porte un rude coup au cinéma martial, alors en plein essor, et laisse les producteurs désarçonnés. Pour pallier à l’absence de l’acteur, les producteurs envisagent différentes stratégies. Certains terminent tant bien que mal (surtout mal en fait) le dernier long-métrage inachevé du Petit Dragon (LE JEU DE LA MORT), d’autres lancent des imitateurs plus ou moins convaincants (Bruce Li, Bruce Le, Dragon Lee,…) et d’autres, enfin, proposent des séquelles plus ou moins officielles aux classiques de Bruce Lee. Les changements de titres rendent d’ailleurs l’identification de ces différentes suites pour le moins ardue et l’amateur risque toujours de tomber sur un navet oublié emballé de manière séduisante pour appâter le chaland. Ainsi, il existe au moins deux BIG BOSS 2 : l’un met en vedette Dragon Lee, l’autre, plus fidèle à l’original, donne le premier rôle à Lo Lieh. On note aussi un WAY OF THE DRAGON 2 (alias LA GRANDE REVENGE DE BRUCE) avec Bruce Le, un JEU DE LA MORT 2 (sans compter les nombreux décalques comme GOODBYE BRUCE LEE : HIS LAST GAME OF DEATH, THE TRUE GAME OF DEATH ou ENTER THE GAME OF DEATH), d’improbables RE-ENTER THE DRAGON, ENTER ANOTHER DRAGON ou ENTER THREE DRAGONS. Bref, un chat ni retrouverait pas ses petits.
LA FUREUR DE VAINCRE, sans doute le plus populaire (surtout en Asie) des cinq films tournés par Bruce Lee au cours de sa brève carrière de star des arts martiaux, eut droit, pour sa part, à de nombreuses déclinaisons. En 1976, Lo Wei, réalisateur du premier volet, engage Jackie Chan et tente de l’imposer comme le « nouveau Bruce Lee » en compagnie de Nora Miao dans le médiocre LA NOUVELLE FUREUR DE VAINCRE. L’année suivante, Tso Nam Lee, spécialiste bien connu du kung fu à petit budget, présente Ho Chung Tao, alias Bruce Li, dans cet anecdotique mais plaisant FIST OF FURY PART 2. Par la suite, Bruce Li tourna une seconde suite, l’efficace LE VENGEUR AUX POINGS D’ACIER, et d’autres productions inspirées de LA FUREUR DE VAINCRE suivirent comme RETURN OF THE FISTS OF FURY, FIST OF FURY 1991, SHAOLIN FIST OF FURY (alias LE DEFI DE LA GRANDE MURAILLE), FIST OF LEGEND ou le récent LEGEND OF THE FIST.
Mais revenons en 1977 et à FIST OF FURY PART 2 : suite à la mort de Chen Zhen à Shanghai, la répression des Japonais s’intensifie envers la communauté chinoise. Un redoutable pratiquant de karaté, Miyamoto, directeur d’une prestigieuse école nippone, ordonne aux responsables de la Ching Wu School de kung-fu de fermer leur établissement. Devant leur refus, les combattants chinois reçoivent une sévère correction de la part des élèves de Miyamoto. Peu après, Chen Shen vient se recueillir sur la tombe de son défunt frère Chen Zhen et, constatant la cruauté des Japonais, décide de rendre lui-même justice en se dressant face à Miyamoto et ses étudiants.
Bénéficiant d’un scénario sans surprise mais respectueux, FIST OF FURY PART 2 constitue une suite honnête au classique de Bruce Lee dont il reprend, sans beaucoup de variations, la plupart des scènes clés. Un jeune Chinois intrépide se révolte contre les tyranniques Japonais et affronte bien des adversaires avant de combattre en duel leur chef, incarné par le légendaire Lo Lieh. Cependant, le long-métrage soigne la continuité et reprend l’intrigue là où se terminait le premier film, juste après l’assassinat du personnage de Chen Zhen, joué par Bruce Lee. Quelques images du Petit Dragon (en guise de flashbacks) suivies de son enterrement et du suicide de sa fiancée installent l’intrigue avant les exactions des cruels nippons. Ceux-ci terrorisent les pratiquants de kung-fu de la Ching Wu School jusque l’arrivée providentielle de Chen Shen, frère de Zhen. Ho Chung Tao, alias Bruce Li, incarne ce fier défenseur de la justice et s’en sort avec les honneurs, parvenant à rester crédible tant du point de vue dramatique (limité mais réel) que lors des nombreux combats martiaux. Ceux-ci, dans un style sec et réaliste popularisé par Bruce Lee, se révèlent convaincants et relativement violents en dépit de chorégraphies sommaires et des coupes de la censure qui exigea, par exemple, le retrait d’une scène montrant Bruce Li défaire quelques méchants à coups de nunchakus. Posé et réfléchi, quoique déterminé, le personnage joué par Bruce Li diffère d’ailleurs grandement de celui incarné par le nettement plus bouillonnant (voire hystérique) Bruce Lee mais la ressemblance frappante entre les deux acteurs permet d’accepter sans la moindre difficulté cette nouvelle orientation.
Hélas, tout n’est pas parfait pour autant, loin de là. Les moyens employés dans ce FIST OF FURY PART 2 sont bien inférieurs à ceux déployés dans LA FUREUR DE VAINCRE et ce manque de budget se ressent de manière parfois criante, notamment dans les décors dépouillés. La mise en scène, pour sa part, reste compétente (et vu le niveau habituel de ce genre de produits ce n’est pas si mal) mais souvent rudimentaire, un défaut encore aggravé par un montage haché effectué à la va-vite. Le rythme un peu léthargique pourra également décevoir les spectateurs, la première heure manquant de nerfs en dépit de quelques combats sympathiques mais trop brefs. Heureusement, le dernier tiers du film favorise l’action pure avec deux longs affrontements, dont un plaisant duel entre Bruce Li et Lo Lieh.
Sans être révolutionnaire ou essentiel, FIST OF FURY PART 2 demeure un des meilleurs exemples de la mode bruceploitation des seventies. Le respect de l’équipe pour Bruce Lee et LA FUREUR DE VAINCRE transpire dans ce modeste mais solide hommage, loin de nombreux titres du genre qui se contentent d’exploiter crapuleusement l’image du Dragon défunt.
Une oeuvrette estimable et divertissante, à conseiller aux fans de bruceploitation et même à ceux de Bruce Lee et de LA FUREUR DE VAINCRE.
(le film complet est sur youtube
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