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> Taiwan, Vingt ans d'émancipation musicale
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DOSSIER

Vingt ans d'émancipation musicale


Stéphane Ferrero


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A côté de la musique pop flamboyante, une place de plus en plus importante est faite à Taiwan aux autres courants musicaux, que ce soit le rock, le hip-hop, le funk ou bien encore le folk. Le développement de ces genres que l'on regroupe facilement sous l'appellation de « musique indépendante » ( indie music en anglais) montre que le public taiwanais se contente de moins en moins des produits aseptisés proposés par les grandes maisons de disques.


De l'imitation à la création

Le foisonnement musical dans lequel est de plus en plus plongée Taiwan prend sa source dans les années 70. Avant cela, l'île n'était pas le théâtre d'une créativité musicale exacerbée. Bien au contraire : on n'y comptait que peu d'auteurs et compositeurs, la musique pop d'alors était le plus souvent calquée sur les modèles japonais ou occidentaux, les chansons étant souvent copiées, voire plagiées.

Dans les années 70, le public commence de se lasser quelque peu de la musique pop locale, d'autant que l'influence américaine est à son apogée. Nous sommes alors en pleine guerre du Viêt-nam, et Taiwan est une des bases arrières des troupes américaines. Les GI ont apporté avec eux leur musique moderne qui se diffuse alors à travers toute l'île. En 1975, le chanteur Yang Hsuan change la donne en sortant un album intitulé Modern Chinese Folk Songs, fait de chansons à texte sur des mélodies folk. Le mouvement est lancé. Dans son sillage, de nombreux jeunes et parmi eux des étudiants, empoignent leur guitare et mettent à composer paroles et musique. Cette nouvelle tendance est aussitôt baptisée « musique de campus », peut-être à cause des concerts qui se déroulent alors dans l'enceinte des universités taiwanaises. Outre le style musical, le véritable changement qui s'opère via la musique de campus, c'est le passage de l'imitation à la création, l'émergence d'auteurs-compositeurs qui auront une influence certaine sur les générations suivantes.

En 1977, ce mouvement, resté jusque-là finalement assez confidentiel, est tout à coup porté sur le devant de la scène, grâce à la mise en place des premiers Golden Melody Awards, une cérémonie annuelle qui récompense les artistes du moment, sur le modèle des Grammy Awards aux Etats-Unis. La musique folk est à son apogée.


Le rock, de l'ombre à la lumière

Dans les années 80 prend corps ce que l'on appelle la « littérature de terroir » qui est le tout premier mouvement culturel à mettre l'accent sur une culture taiwanaise spécifique, et cela avant même la levée de la loi martiale en 1987. Dans le sillage de ce phénomène littéraire, un certain nombre de mouvements sociaux voient le jour, et la société insulaire commence à se pencher sur la question de son identité. A ce titre, les années 80 constituent l'âge d'or de l'activisme social à Taiwan. Le monde de la musique ne fait pas exception. Jusqu'au milieu de la décennie 80, l'exercice autoritaire du pouvoir induit une certaine méfiance vis-à-vis de la création artistique, strictement contrôlée. En matière musicale, seule la musique pop est diffusée par les médias et les maisons de disques, car elle n'est pas « sub versive ». En 1986, un groupe d'amis musiciens ne supporte plus cet environnement musical décidément trop pauvre et formaté. Ils décident ainsi de monter leur propre label, Crystal Records, afin de diffuser dans un premier temps certains groupes étrangers versés dans la musique indépendante. Parallèlement, ils créent le Wax Club, ainsi qu'un magazine dont l'objectif est de sensibiliser la jeunesse taiwanaise aux nouveaux courants musicaux et aux grands thèmes sociaux. Crystal Records organise également entre 1987 et 1990 le Festival de la nouvelle musique de Taipei qui fait la promotion des nouveaux groupes taiwanais. Les nouveaux talents de l'époque ont pour nom Blacklist Workshop, Lim Giong, Jutopi ou Wu Bai.

En 1989, c'est justement Blacklist Workshop qui sort son pre mier album intitulé Songs of Madness, un album fondateur pour la musique rock à Taiwan. Les textes des dix chansons présentes sur cet album ont de fortes connotations politiques et la musique est très avant-gardiste, avec des rythmes rock et, déjà, quelques touches de hip-hop. Cependant, si la musique indépendante est soutenue par le milieu artistique, il lui manque l'essentiel : le soutien du grand public.


Dans le sillage de Wu Bai
Les choses vont un peu évoluer au milieu des années 90, avec l'apparition de la première star du rock taiwanais, Wu Bai, « le roi de la musique live », comme les médias le surnomment volontiers. Wu Bai, accompagné de son groupe, China Blue, a passé une dizaine d'années à se produire dans les minuscules salles de concert et pubs de la capitale avant d'être remarqué par Magic Stone Records.

Les riffs de guitare et la voix particulière du chanteur et guitariste Wu Bai ne laissent pas insensible. L'identification est forte pour le public d'autant que Wu Bai chante non seulement en mandarin mais aussi en taiwanais. Et outre ses compositions qui sont aujourd'hui devenues des classiques, il interprète des chansons taiwanaises traditionnelles dans une version très rock. C'est donc presque tout naturellement que Wu Bai devient l'icône du rock taiwanais.

En 1999, la très indépendante maison Taiwan Colors Music sort une compilation tout simplement intitulée Taiwan Independent Compilation qui annonce la naissance d'une nouvelle génération de groupes indépendants. Sur cet album, on retrouve May Day, Chairman, BackQuarter et Clippers, des groupes qui aujourd'hui bénéficient tous d'une grande notoriété. May Day a connu l'ascension la plus fulgurante, devenant l'un des groupes taiwanais phares tous styles confondus. Chairman a été élu l'an passé Meilleur groupe de l'année aux Golden Melody Award pour son album Looking For a New World. BackQuarter con tinue d'arpenter les scènes de l'île, chacune de ses apparitions étant un événement. Quant au groupe des Clippers, il a pour sa part fait le choix d'osciller entre tradition musicale taiwanaise et musique électronique.

Les années 90 voient la naissance de nombreux groupes et artistes qui, aujourd'hui encore, font parler d'eux. Parmi ceux-ci, on retrouve notamment LTK Commune, Chang Chen-yue, MC HotDog ou Chthonic.

Le développement de ces nouvelles tendances musicales qui cohabitent désormais avec la musique pop s'est accéléré dans les années 90, de pair avec la multiplication des salles de concerts, des festivals et des labels dédiés à la musique indépendante.


Que cent groupes rivalisent
Démocratisée depuis une vingtaine d'années, Taiwan fait aujourd'hui preuve d'une créativité musicale exceptionnelle. Tous les courants de la musique indépendante sont représentés, que ce soit le rock, le punk, le funk, le folk, le hip-hop, etc., chaque mouvance ayant ses ambassadeurs.

Cette diversité est aussi linguistique. Certains, à l'instar de LTK Commune ou de Luantan Ascent, ont choisi le taiwanais (ou minnan), d'autres, comme Sheng Xiang & Water 3 ou Hohak Band, chantent en hakka. Les langues aborigènes sont largement employées elles aussi, par exemple par la chanteuse aborigène Samingad ou par Pau-Dull, tous deux issus de la tribu des Puyuma. Parfois, les différentes langues se télescopent à l'intérieur même des chansons, une pratique très en vogue dans le milieu du hip-hop qui n'hésite pas à mélanger mandarin, taiwanais et anglais.

Chaque année, de nouveaux groupes font leur apparition, et les cafés-concerts eux aussi se multiplient. Citons par exemple The Wall, inauguré à Taipei en novembre 2003, qui est la plus grande scène de l'île entièrement dédiée à la musique indépendante.

L'engouement du public s'explique en partie par la mutation de la société qui, après s'être enrichie durant la période du « miracle économique » est aujourd'hui peut-être plus en quête de nourritures spirituelles.

La multiplication des groupes a aussi été encouragée par l'apparition de nombreuses maisons de disques, souvent des mi crostructures qui ont misé sur certains artistes avec plus ou moins de succès.

L'autre élément ayant contribué à cette nouvelle richesse musi cale est l'apparition de trois grands festivals annuels qui sont de véritables tremplins pour certains groupes et permettent en tout cas au public de découvrir de nouveaux artistes.

L'histoire de la musique indépendante taiwanaise est encore assez courte mais déjà riche en créativité, ce qui va de pair avec les aspirations d'un public de plus en plus enclin à s'éloigner des sons formatés. Ce qui est certain aujourd'hui, c'est que la musique indépendante est à Taiwan un marché à part entière.


Trois festivals, un objectif commun

Les festivals de musique indépendante se succèdent à Taiwan tout au long de l'année. Parmi ceux-ci, trois se distinguent par leur renommée et leur fréquentation. Ce sont aussi les plus an ciens. Spring Scream existe depuis 1995 et se déroule chaque année sur plusieurs jours dans la zone balnéaire de Kenting. A l'origine de ce grand rendez-vous du rock, on trouve Wade Davis et Jimi Moe, deux expatriés venus enseigner l'anglais à Taiwan, qui eurent l'idée de faire se côtoyer le temps d'un week-end des groupes locaux et étrangers, chose qui ne s'était jamais faite auparavant. Dix ans plus tard, Spring Scream est le plus grand festival de l'île de Taiwan. Cinq jours durant, deux cent cinquante groupes se succèdent sur les différentes scènes mises à leur disposition.

En l'an 2000, c'est le Festival de rock Hohaiyan qui voit le jour à Kungliao sur l'initiative de la maison de disques Taiwan Colors Music. Ne rassemblant au départ que quelques groupes, cet événement qui se déroule annuellement au mois de juillet sur la plage de Fulung, sur la côte nord-est, n'a cessé de grossir pour finalement devenir un festival culte attirant des milliers de visiteurs grâce à un concours du meilleur groupe taiwanais de musique indépendante.

Le troisième festival incontournable s'appelle Formoz et a lieu au mois d'août dans la capitale taiwanaise. Il a fêté son douzième anniversaire l'an passé. Formoz est organisé par Taiwan Rock Alliance (TRA), une société spécialisée dans l'événementiel à la tête de laquelle on retrouve Freddy Lin, le charismatique chanteur de Chthonic, un groupe taiwanais de black metal. Formoz invite chaque année, le temps d'un week-end là encore, plus d'une centaine de groupes représentatifs des différentes tendances de la musique taiwanaise actuelle. Plusieurs d'entre eux viennent généralement du Japon et de Hongkong, permettant ainsi aux Taiwanais d'avoir une idée de ce qui se fait ailleurs dans la région au niveau musical.




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Quand passion rime avec succès


Stéphane Ferrero

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Le festival de Fulung. Le rock sur la plage, les pieds dans l'eau !

Selon la Fédération internationale de l'industrie phonographique, en 2005, les Taiwanais ont acheté 10,8 millions de disques. Ce chiffre confirme la chute des ventes amorcée au milieu des années 90 et imputée au piratage et au développement des nouvelles technologies (Internet, graveurs de CD, MP3, P2P). A titre de comparaison, en 1995, plus de 40 millions d'albums avaient été vendus à Taiwan pour une population d'environ 22 millions d'habitants à l'époque.

Les grandes maisons de disques internationales et locales peinent à trouver des solutions pour contrer le phénomène et maintenir un volume de ventes convenable. Paradoxalement, on assiste à l'apparition de nombreux labels plus modestes qui choisissent de se lancer dans la diffusion de musique indépendante. Et parmi cette myriade de PME, on retrouve trois maisons de disques qui parviennent non seulement à tirer leur épingle du jeu mais qui jouent aussi et surtout un rôle déterminant dans le développement et la diversification que vit actuellement Taiwan au niveau musical.


Des labels de caractère

Aux Golden Melody Awards 2005, ce sont les douze années de travail de Trees Music & Arts qui furent récompensées à travers les six distinctions attribuées au groupe taiwanais Sheng Xiang & Water 3 et les deux autres décernées à Urna, une chanteuse d'origine mongole.

Ce travail de fond est entièrement dû à la fondatrice de Trees Music & Arts : Chung Shefong, une femme de caractère qui a toujours eu pour objectif de promouvoir les musiques du monde à Taiwan. « J'ai monté ce label en 1993 parce qu'à l'époque, Taiwan manquait cruellement de diversité musicale. J'adorais les musiques africaines et latino-américaines, mais c'était difficile de trouver ce genre d'albums ici. Lorsque j'ai distribué les premiers CD importés, les disquaires ne savaient même pas dans quel rayon les classer. L'expression même de « musiques du monde » était ici encore inconnue. Et en 1995, j'ai commencé à produire moi-même des artistes taiwanais. Je me suis dit que si je voulais sauvegarder les différents courants musicaux traditionnels, je devais commencer par les musiques traditionnelles de Taiwan. » Aujourd'hui, Trees Music distribue avec succès de nombreux artistes insulaires, dont le groupe aborigène des Betel Nuts Brothers et le groupe hakka Sheng Xiang & Water 3.

Parmi ces petits labels qui font aujourd'hui référence, se trouve aussi la maison de disques Taiwan Colors Music (TCM), créée par Zhang 43. Ancien animateur d'une radio pirate, ce chanteur d'origine aborigène, engagé politiquement, est proche de la mouvance indépendantiste. Il a monté le label TCM en 1998. Neuf années plus tard, il reste fidèle à ses convictions de départ : produire la musique qu'il aime écouter. Outre des choix éclectiques (chanteurs aborigènes, musiques du monde, rock indépendant, hip-hop) qui ont ouvert l'horizon musical des Taiwanais, TCM s'est fait remarquer par l'originalité de ses pochettes. « Comment faire lorsqu'on est une petite maison de disques et qu'on veut que nos CD soient visibles de tous ? » Zhang 43 a trouvé la réponse : « J'ai eu l'idée de faire des pochettes de 30 cm de côté, c'est-à-dire pratiquement la même taille que des vinyles. Et à l'intérieur se trouve un livret qui se feuillette comme un magazine. Nous présentons le groupe ou le chanteur, l'univers dans lequel il évolue, sa vie, les gens qu'il fréquente. »

En 2004, Click Music est venu grossir les rangs des labels indépendants, mais pas seulement. En un peu plus de deux années d'existence, cette maison de disques est devenue incontournable à Taiwan. Ce succès fulgurant est sans doute dû à l'expertise de Jack Wang, son jovial patron, dont les goûts musicaux sont très sûrs. Vieux routard de l'industrie du disque, Jack Wang a débuté dans le métier en 1985 en travaillant pour Rock Records, une société qui était alors l'agent d'EMI et de SONY Music pour Taiwan. Une dizaine d'années plus tard, il s'est retrouvé à la tête de Magic Stone, une maison de disques taiwanaise majeure chez laquelle on retrouve alors des artistes comme Wu Bai, Chang Chen-yue ou encore Sunza. « Mais en 2002, Magic Stone a été vendue. La société ne perdait pas d'argent, c'est son marché qui se rétrécissait, explique aujourd'hui Jack Wang. Je suis donc retourné chez Rock Records où j'ai été chargé d'étendre notre marché en Chine. En 2004, j'ai voulu monter un label qui donne un véritable espace d'expression à la musique indépendante taiwanaise. Ce sont les grandes maisons de disques qui ont la mainmise sur le marché. Mais si les groupes indépendants n'existaient pas, elles n'auraient aucune matière première musicale. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé d'investir dans ce créneau. »


Imaginer de nouvelles stratégies

Sur fond de crise, les ventes d'albums des groupes indépendants ne sont pas suffisantes pour assurer des revenus stables et conséquents à ces labels. S'il est vrai que ces dernières années, les goûts du grand public taiwanais se sont diversifiés, les stars de la musique pop et donc les grandes maisons de disques tiennent toujours le haut du pavé. Une maison indépendante ne presse généralement que 2 000 copies d'un même album, 5 000 dans le meilleur des cas. Et de faibles moyens financiers induisent un manque de lisibilité dans les médias qui font le lien entre maisons de disques et grand public. S'ils veulent survivre, les petits labels doivent développer des stratégies alternatives.

Click Music s'appuie sur la distribution de musique étrangère pour générer des revenus qui sont ensuite réinvestis dans la pro duction de groupes taiwanais. « Pour ce qui est de la musique étrangère, confie Jack Wang, je me concentre sur ce qui peut intéresser les adultes âgés de plus de 30 ans. J'importe principalement du jazz, de la musique classique et électronique. Je recherche la qualité. Ici, je m'occupe de fabriquer des pochettes correspondant au marché taiwanais. »

Chung Shefong importe pour sa part beaucoup de musique latino-américaine, très tendance à Taiwan depuis quelques années, en partie grâce à elle d'ailleurs. C'est par exemple sous son label que l'album Buena Vista Social Club s'est retrouvé dans les bacs des disquaires de l'île.

Les festivals de musique sont aussi un bon moyen de faire découvrir au grand public des genres musicaux nouveaux et des groupes indépendants. En l'an 2000, TCM a lancé le festival de rock Hohaiyan, à Kungliao, qui est aujourd'hui l'un des trois plus grands rendez-vous de l'année. « Au départ, le projet a été présenté au district de Taipei qui a décidé de collaborer avec nous pour que ce festival existe. C'est ensuite que nous avons trouvé le site de Fulung qui est au bord de la mer et facilement accessible en train. De plus, comme ce n'était pas un site touristique, le festival a apporté un vrai "plus au niveau économique », explique Zhang 43. Mais TCM n'est pas le seul label à s'être lancé dans la mise en place d'événements. Trees Music organise chaque année à Taipei depuis 2001 le Festival de musique itinérante qui est dédié aux musiques du monde et qui sert d'espace d'échange entre le public et les artistes, grâce à de nombreux ateliers, conférences et expositions en marge des concerts.

Jack Wang a pour sa part mis son expérience et ses contacts au service de la musique indépendante taiwanaise. « Le marché insulaire reste restreint et l'objectif à moyen terme est de promouvoir ces groupes en Chine. Et là-bas, il y a de la place pour la musique indépendante taiwanaise ! »

***


Trois maisons de disques en un clic de souris

Click Music : www.clickmusic.com.tw
Taiwan Colors Music : www.tcmusic.com.tw
Trees Music & Arts : www.treesmusic.com



Où écouter de la musique indépendante taiwanaise sur Internet ?

Le site de la maison de disque Taiwan Colors Music (www.tcmusic.com.tw ) est le plus développé en la matière. Il propose un ou plusieurs morceaux en écoute pour chaque album. Le site est bilingue chinois/anglais. TCM est la seule maison de disque indépendante à proposer aux internautes des chansons en écoute gratuite.

Sur son site personnel, le chanteur Luantan Ascent propose, lui, des vidéo-clips gratuits en streaming (www.chockablock.com.tw /luantan_ascent ). Là encore, il s'agit du seul site d'artiste à proposer des chansons en écoute gratuite. Le site est en chinois, seuls les titres des rubriques sont en anglais. Pour voir les clips vidéo, allez dans la rubrique « Video ».

Le meilleur moyen pour se faire une idée de ce qu'est la musique indépendante taiwanaise est encore d'aller sur YouTube (www.youtube.com). Les artistes indépendants cherchent à se faire connaître, et Internet est un excellent média. Là, en tapant simplement le nom d'un groupe ou d'un chanteur, vous pouvez souvent accéder à des vidéo-clips ou à des concerts filmés en mode streaming.

Bonne navigation !


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La tradition de l'avant-garde


Stéphane Ferrero



Lors du dernier Festival des « indés » qui se déroulait le temps d'un week-end en novembre dernier dans l'enceinte du Parc culturel de Huashan, en plein cœur de Taipei, les spectateurs étaient venus nombreux pour assister aux concerts successifs. A l'extérieur aussi, juste avant d'arriver au guichet, l'attroupement était permanent : sur l'esplanade, les trois membres des Clippers avaient décidé de donner une représentation fleuve et gratuite.

Cette démarche correspond bien à l'état d'esprit du fondateur et chanteur de ce groupe, Hsiao Ying, qui reprend ainsi le flambeau des artistes taiwanais de jadis et qui, comme ses aînés, se sent avant tout au service de son public. Aujourd'hui, les Clippers savent mieux que personne faire coexister modernité internationalisée et tradition musicale locale. Un savant équilibre qui frise parfois l'avant-garde et qui est le fruit d'une dizaine d'années de création musicale.


Trouver sa voie
Les Clippers voient le jour en 1995, sur l'initiative du chanteur Hsiao Ying. C'est lui, qui dès les débuts, imprime sa marque à la formation. « A l'époque, le groupe était plutôt du genre expérimental. Ce qui m'intéressait, c'était de trouver des sonorités particulières. »

Après une première année passée à se chercher, les Clippers se dirigent rapidement vers un rock qui déjà présente certaines caractéristiques que l'on retrouve encore aujourd'hui dans leur répertoire, comme la présence d'airs nakashi (voir encadré) et du synthétiseur. Côté chant, Hsiao Ying adopte ce qu'il appelle la technique du « two men talk » qui consiste à instaurer un dia logue à deux. Et comme il n'y a qu'un seul chanteur, eh bien, il interprète lui-même les deux voix ! Mais pour Hsiao Ying, très influencé par la tradition musicale taiwanaise, les concerts du groupe manquent alors d'énergie. « Les spectateurs n'étaient pas très concentrés. Ils se contentaient d'applaudir à la fin des chan sons. C'est la raison pour laquelle j'ai commencé à travailler mon jeu scénique et qu'en 1998, j'ai intégré deux danseuses dans le groupe. » Le rôle des danseuses n'est pas véritablement d'interpréter des chorégraphies élaborées. Il s'agit beaucoup plus d'expression corporelle. Leur travail consiste à imprégner un certain rythme en suivant à la fois la musique et les paroles.

En l'an 2000 sort Turn on the Discoball, le premier album des Clippers sous le label Taiwan Colors Music. C'est un feu d'artifice musical où s'entremêlent rock, folk, nakashi, mélodies faussement naïves et accents de marches militaires. Les paroles des douze chansons sont tour à tour absurdes ou décalées, mais dépeignent à merveille la réalité sociale taiwanaise de ce début de XXIe s. Plus de 7 000 exemplaires sont vendus en quelques mois, un record à l'époque pour un groupe dit underground. Viennent alors les interviews et les invitations aux shows télévisés. Les Clippers sont même élus meilleur groupe taiwanais par la chaîne de télévision Channel [V]. Pourtant, cela n'entame en rien l'humilité du chanteurcompositeur Hsiao Ying qui con tinue de donner des concerts gratuits devant les temples ou sur les marchés, s'inscrivant ainsi dans la plus pure tradition taiwanaise. Les choses vont aller ainsi quatre années durant.


Rester aux avant-postes de la création
Sur l'album intitulé Une idée tombée du ciel, qui sort en 2005, on observe de grands changements. Si l'esprit est resté le même, la musique s'est faite plus électronique et la composition du groupe est désormais limitée à trois personnes.

« J'avais fait du rock pendant sept ou huit ans, explique Hsiao Ying, mais je me suis rendu compte que le processus de création n'était pas aussi efficace que ce que j'espérais. Je voulais trouver un moyen plus simple de faire de la musique, car le rock demande une certaine logistique. La musique électronique m'a paru le meilleur médium : il suffit d'un ordinateur. »

En 2004, alors que Hsiao Ying s'est séparé de ses musiciens, il rencontre DJ Ty dans les locaux de Taiwan Colors Music. Depuis, les deux hommes travaillent ensemble en compagnie de l'une des deux danseuses, car Hsiao Ying n'a pas abandonné son concept de spectacle total. « Moi, je m'occupe des arrangements et du chant. DJ Ty fait son travail de DJ en mixant les sons, et LaLa danse. »

Aujourd'hui, les Clippers semblent avoir retrouvé leur vocation initiale. Leur musique est expérimentale et inclassable, les textes parlent plus que jamais de la société taiwanaise et de ses défauts. « Nous utilisons toute sortes de mélodies pour évoquer les problèmes de société ou mieux comprendre la nature humaine : ce peut être de la musique techno, du folk, du rhythm'n'blues, du jazz ou du disco. »

Les Clippers établissent un véritable pont entre tradition taiwanaise et modernité inéluctable. De l'avis de tous, ce groupe est l'un des rares à préserver un véritable patrimoine tout en restant ouvert à la création. « Je m'appuie sur la musique d'autrefois, ma manière de chanter ressemble par exemple beaucoup à ce que faisaient les chanteurs populaires d'antan , explique Hsiao Ying. Mais dans le même temps, j'ai la volonté de rompre avec ce passé et de me tourner vers l'avenir. Finalement, ma manière de préserver le patrimoine taiwanais, c'est de m'intéresser à ce que la plupart des gens considèrent comme indigne, comme le fait de parler le chinois mandarin avec un fort accent taiwanais. Moi, cela m'inspire des textes. »

Et c'est justement en allant puiser dans ce patrimoine que les Clippers se sont hissés à l'avant-garde de la scène indépendante taiwanaise. La meilleure preuve : le spectacle radiophonique basé sur Le cercle de craie caucasien , une pièce de Bertolt Brecht adaptée par Hsiao Ying.

*



The Clippers en 5 albums

2000 Turn on the Discoball [Zhuan ba, qi cai ni hong deng ! ]
2003 Je ne sais pas parler taiwanais* [ Wo buhui shuo taiyu]
2005 Une idée tombée du ciel * [Tu fa qi xiang]
2006 Tout n'est que futilités* [ Yiqie de yiqie dou shi hala !]
2006 Le cercle de craie caucasien, spectacle radiophonique* [Gaojiasu huilan yinyue guangboji ]


*

La musique nakashi

La musique nakashi apparaît à Taiwan durant l'occupation japonaise et se développe à partir des villes portuaires de Tamsui et de Keelung, situées au nord de l'île. Dans les premières années du XXe s., les marins japonais jouent dans les bars une musique issue de l'enka (sorte de musique country japonaise). Au fil des décennies, cette musique, accompagnée de textes souvent empreints de mélancolie, s'est taiwanisée, se mélangeant aux airs traditionnels venus de la province chinoise du Fujian et au folklore local.


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Lors d'un concert improvisé à Huashan, Lala vend les CD du groupe.


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Ecrit le : Vendredi 06 Avril 2007 07h51
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Dragon



Très très très interessant , un article sur la musique taiwanaise était déja paru en il y a de celà 6 ou 7 ans par l'attaché audiovisuel français de l'époque à Taiwan.

Stéphane Ferrero fait une bonne synthèse mais ne va pas parfois ds le fond, par exemple sur Lim Giong il ne parle pas de son premier album Marching Forward en 1990 qui fut un album mythique car le premier à s'exprimer en taiwanais depuis la levée de la loi martiale.

Ensuite il laisse de côté les labels magicstone et rock records (mais il les évoque) qui sont à la base de tout le mouvement musical de fin 80 à 2000. La dessus y a dequoi faire un dossier de fou furieux.

Puis où sont tous les nouveaux talents ? Summer Lei, Europe Huang, Chang Xuan etc..


Autrement le côté festival est excellent il faut être la bas pour en parler , le témoignage est très enrichissant.

Bref, un très bon article, il en faut plus des comme ça, continuez !!! wub.gif wub.gif wub.gif wub.gif


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